Le feu de poubelle - Épisode 1
by Chris Marie Green
Je ne sais pas comment te dire ça autrement, Sierra…
Alors, je vais juste le dire franchement…
Je te largue.
La voix de Brock retentit par-dessus la musique…
Et le silence tombe sur la fête.
J’ai la tête qui tourne.
Tu me… largues ?
Devant tout le monde ?!
Brock lève les yeux au ciel.
N’en fais pas un drame.
Tu ne me plais pas tant que ça, c’est tout…
Et honnêtement, je crois que tu ne m’as jamais vraiment plu.
J’ai l’impression d’avoir été giflée à l’aide d’un poisson mouillé.
Mais Brock a l’air de s’en moquer.
Il se contente de me tourner le dos…
Et se met à parler à ses copains comme si je n’existais pas.
Je reste plantée là, les poings serrés…
Désirant plus que tout lui dire ses quatre vérités.
Mais l’humiliation m’a rendue muette.
Les choses empirent encore quand j’entends deux filles jacasser derrière moi.
La pauvre !
Ouais, elle se fait CONSTAMMENT lourder.
J’imagine que c’est pour ça qu’on l’appelle le feu de poubelle : elle se fait tout le temps jeter, et ses relations partent en fumée !
Ma peau s’empourpre.
Pas seulement à cause de la cruauté des deux filles…
Mais parce qu’elles disent la vérité.
Je suis réellement un feu de poubelle.
Rien que cette année, on m’a larguée cinq fois…
Et j’ignore complètement pourquoi.
Est-il À CE POINT impossible de m’aimer ?
Submergée par le chagrin, je me précipite à l’extérieur.
Mais je ne vais pas loin.
Quelqu’un se trouve sur le porche, accoudé à la balustrade.
Il s’agit de Cody Gibson.
Waouh… c’était violent.
Cody s’est fait virer de l’équipe de football américain du lycée il y a peu.
Personne ne sait pourquoi…
Et Cody se garde bien d’en parler.
Avec son allure de bad boy, il a l’air de s’en moquer, de toute façon.
Il désigne la porte moustiquaire du menton.
Brock s’est comporté comme un vrai connard.
Ouais. Je ne savais pas qu’il pouvait être comme ça.
Dommage que tu l’aies découvert à la dure.
Quelque chose de sombre envahit les yeux de Cody.
On dirait presque qu’il y a de l’animosité entre lui et Brock.
Mais avant que j’aie pu lui demander si c’est le cas, Cody hausse les épaules.
Tu devrais rejoindre la fête…
Et montrer à tout le monde que tu te portes très bien sans Brock.
Pas question. Tu as entendu le surnom qu’ils me donnent ?
Le feu de poubelle.
Et c’est parce que chaque fois que je sors avec un mec…
Je me fais jeter comme un déchet, et tout part en fumée.
Je soupire.
C’est arrivé tellement de fois…
Que je commence à penser que je ne trouverai jamais quelqu’un qui voudra de moi.
Oh, non. Ne t’épanches pas comme ça, Sierra !
Mais, à ma grande surprise, Cody ne se moque pas de moi.
Il me regarde simplement, une lueur indéchiffrable dans ses yeux gris.
Sierra…
Il y a forcément quelqu’un qui te correspond.
Il faut juste que tu regardes un peu mieux autour de toi.
Il s’apprête à ajouter quelque chose…
Mais il est interrompu par un son en provenance de la fête :
Le rire caractéristique de Brock.
Ce rire me rappelle tous les mecs qui m’ont larguée…
Et tous ceux qui me largueront.
Je m’éloigne de Cody.
J’aimerais te croire…
Mais je me suis brûlée trop souvent.
Sur ces mots, je laisse Cody au silence du porche.
Une fois le week-end passé, je me traîne jusqu’au lycée.
Mon Dieu, comme je redoute d’arriver.
Brock sera là…
Ainsi que tous ceux qui étaient présents à cette horrible fête.
Je me prépare à ce qui m’attend tout en entrant aussi discrètement que possible…
Mais quelque chose attire mon attention.
Une petite foule d’élèves se tient devant les portes du lycée…
Les yeux levés vers une grande pancarte accrochée au mur.
Je lis ce qui y est écrit :
SIERRA, TU MÉRITES BEAUCOUP MIEUX QUE BROCK KEATON !
La mâchoire m’en tombe.
Qui afficherait une pancarte pareille ??
Avant d’avoir pu le déterminer, quelqu’un l’arrache du mur.
Brock déchire le papier et me regarde d’un air furieux.
Sierra, si c’est comme ça que tu essaies de te venger…
C’est carrément raté !
Attends. Tu crois que c’est moi qui ai fait cette pancarte ?
Qui d’AUTRE ?
Son visage a pris une vilaine teinte rouge.
Waouh. Qu’est-ce que j’ai bien pu lui trouver ?
Je décide de l’ignorer et le dépasse…
Pour pénétrer dans l’école.
Je souris en pensant à la pancarte.
Quelqu’un dans ce lycée m’a repérée…
Et a dit quelque chose de gentil à mon sujet.
Mais qui ??
Je découvre de nouvelles pancartes en avançant dans le couloir.
Mon cœur bat la chamade tandis que je les lis :
SIERRA, CHOISIS LE BON MEC, CETTE FOIS-CI…
QUELQU’UN QUI APPRÉCIE TOUT CE QUE TU AS À OFFRIR…
… TON BEAU SOURIRE…
ET TON INTELLIGENCE.
Je rougis.
Le souffle coupé, je suis sur le point de lire la pancarte suivante…
Mais le corps massif de Brock bloque soudain mon champ de vision.
Arrête un peu, Sierra.
Ton petit coup monté ne trompe personne.
Tu essaies juste de me rendre jaloux.
Je lève les yeux au ciel.
Je suis désolée de te dire ça, Brock…
Mais tu n’en vaux pas la peine.
Peu importe. Même si tu avais vraiment un admirateur secret…
Il finirait quand même par te jeter…
Comme tout le monde.
Je tressaille.
Seulement parce que j’ai moi aussi pensé la même chose.
Mais j’entends soudain la voix de Cody résonner dans le couloir.
Tu te demandes qui a écrit toutes ces pancartes, Brock ?
C’est MOI.
Je jette un œil en direction de sa voix et découvre Cody qui se tient là…
Un regard assassin rivé sur Brock.
Mon cœur s’arrête.
C'est Cody, mon admirateur secret ??
Il se dirige vers Brock d’un pas raide.
Chaque pas qu’il fait emplit un peu plus mon cœur d’émotion.
Pendant la fête, Cody m’a dit qu’il existait quelqu’un qui me correspondait…
Et il parlait de LUI-MÊME !
Brock considère Cody avec un sourire méprisant.
J’aurais dû deviner que tu étais derrière tout ça.
Mais admets-le, Gibson…
Tu n’as pas fait ces pancartes parce que tu aimes Sierra.
Le sourire méchant de Brock s’élargit.
Tu te sers juste de mon ex pour m’atteindre.
Après tout, c’est moi qui t’ai fait virer de l’équipe de foot !
Mon cœur manque un battement…
Et j’ai l’impression d’avoir une pierre dans l’estomac.
J’attends que Cody dise à Brock qu’il se trompe…
Qu’il pense vraiment que j’ai un beau sourire…
Et qu’il pense vraiment que je suis intelligente.
Mais il se contente de fusiller Brock du regard.
Brock éclate de rire.
Tu vois, Sierra ? Ton prétendu admirateur secret ne cherchait qu’à se venger de moi.
Tu viens de te faire jeter une nouvelle fois !
Les larmes brouillent ma vue.
Je me détourne et avance à l’aveuglette dans le couloir.
Ce rejet me fait plus mal que n’importe quelle rupture…
Parce que je pensais réellement plaire à Cody.
J’ouvre maladroitement mon casier…
Et profite de l’abri que m’offre la porte pour dissimuler mon visage.
C’est à cet instant que la première larme roule sur ma joue.
Mon Dieu, qu’est-ce qui empêche les gens de m’aimer ?
J’appuie ma tête contre la porte du casier voisin…
Et ce faisant, je vois le dos de ma porte.
Une autre pancarte y a été collée :
SIERRA, FAIS-MOI CONFIANCE…
JE NE TE BRISERAI JAMAIS LE CŒUR.
Du coin des yeux, je vois que quelqu’un se tient tout près.
Cody met les mains dans les poches avant de son jean.
Désolé, je suis en retard.
Je m’assurais juste que Brock ne t’emmerderait plus.
Je n’arrive toujours pas à croire qu’il est sincère.
Alors, je me hérisse.
Je ne crois pas que Brock soit mon problème, Cody.
C’est toi qui viens de me poignarder dans le dos.
Mais je rencontre soudain ses yeux gris.
Ils sont emplis d’une émotion que je n’ai jamais vue auparavant.
Sierra, c’est vrai, je voulais provoquer Brock.
Il m’a fait virer de l’équipe de football…
Juste parce que je prenais sa position de départ.
Alors, c’est pour ça que tu as affiché toutes ces pancartes ?
Pour te venger de lui ?
Non, pas du tout.
Il semble extrêmement peiné.
Je voulais juste te montrer que tu plais à quelqu’un, Sierra…
Et que ce quelqu’un, c’est moi.
Mon cœur se gonfle de joie.
Et à présent, je ne peux pas le nier…
Je veux laisser à Cody sa chance d’être la personne faite pour moi.
Je le prends par la main.
On dirait que tu avais raison, Cody…
Je n’ai fait que choisir des mecs qui ne me correspondaient pas.
Mais maintenant, je crois que je choisis enfin le bon.
Alors que Cody entremêle ses doigts aux miens…
Quelque chose s’embrase en moi.
Mais cette fois-ci, ça n’a rien d’un feu de poubelle…
C’est une flamme qui fait fondre mon cœur tout entier.
App